LE BAL DES FOLLES

Ils ont organisé une fête.

C'est bien gentil de leur part de penser à nous.

Pour faire plus réel dans le décor, ils ont invité les gens du dehors. Et ils sont venus, ils sont tous là, les familles, les amis, les voisins et le curieux inconnus.

Même pas peur, ils sont là pour se rincer le gosier et que ce spectacle rare est gratuit. Même les consommations. Gâteaux maison mais immangeables, sodas et jus de fruits tiédasses donc imbuvables. Pas la moindre goutte de vodka et pour fumer, c'est dehors. La règle c'est la règle, même pendant la fête.

Nous, on fait semblant de rire et de s'amuser. Mais c'est pour du faux. On ne veut vexer personne. Tous, ceux du dedans, on voudrait bien que ça s'arrête et que l'on puisse réintégrer la grisaille routinière.

Sauf la grosse microcéphale de Jocelyne. Mais elle rigole tout le temps sans savoir pourquoi. Comme elle se pisse dessus.

Et avant pour les flonflons de la valse.

Qui ici, forcément, tourne à l'envers sur une musique triste à faire pleurer une division de bipolaires en phase maniaque.

Aujourd’hui, c'est comme à Noël ou au premier janvier, ils vont nous faire danser.

Je saute sur Florian sans lui demander son avis. Il est beau comme un dieu et je me le ferais bien. Mais j'ai beau me frotter le bas ventre contre sa braguette, il ne bande pas. A croire qu'il est homo ou impuissant. Pourtant il se dit qu'il couche avec Cindy.

Moi, je m'excite comme une malade, j'ai la chatte trempée et les seins durs comme du béton. En m'échauffant à l'allumer.

Mais il reste droit dans ses bottes. Aucune réaction. Alors je le lâche et je m'enfuis pour fumer une cigarette sur les marches.

Je déprime.

C'est très con de déprimer quand c'est la fête. Mais je ne peux pas faire semblant. Je ne suis pas comme elles, les autres, les contentes de leur sort toutes déguisées et maquillées comme pour un carnaval des déjantées, toutes les à côté de leurs godasses et les en dehors de leur tête.

Des envies de meurtres.

Je vous voudrais voir la mer.

Venez m'sieurs dames !

Le bal est ouvert !

Ce soir on va danser !

Entrez, entrez, bienvenue à l'asile de la sainte et vertueuse pitié.

Bienvenue chez les folles.

Braves gens.