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20 mars 2021

PROVINCE

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Putain de ville endormie sans rêve ni cauchemar dans le trou du cul de la province profonde.

Qui passe son temps à ruminer encore et encore le souvenir du temps où l'industrie papetière, tout en empuantant le fleuve, faisait sa richesse. Et les regrets de sa gloire éteinte de place forte imprenable et de ville royale.

Mortellement grise.

Parce que tout y est gris, les rues, les pierres, les gens, le fleuve, le ciel.

Même le soleil y est gris.

D'une banalité navrante dans laquelle on s'ennuie ferme.

Surtout le dimanche et le soir après dix neuf heures.

Comme de bien entendu.

Ici, même l'ennui est banal.

Mais c'est un ennui de tradition, un ennui distingué qui ne se montre pas.

 

Il y a la Ville haute. Encore appelée Le Plateau.

Entourée de ce qui reste des remparts. Rasés à un mètre du sol par ce XIX° siècle impie et meurtrier.

C'est tristement chiant et et démodé comme une chanson de Piaf ou de Brel.

A l'est et au sud, les quartiers saint Pierre et de l'Arsenal. Réserve naturelle des gens bien, haute bourgeoisie locale toujours bien pensante. Jadis catholique pratiquante elle vote aujourd'hui majoritairement socialiste de bon ton. Le même visage de la vertu sous le masque de l'hypocrisie. Rien n'y a changé depuis deux cents ans.

A l'ombre de la cathédrale réellement romane et du « château ». L'hôtel de ville, une horreur architecturale en faux gothique mais vrai mauvais goût petit bourgeois. Voisin de la préfecture et de la banque de France.

A l'ouest et au nord, avec vue sur le fleuve, le quartier sainte Marie. Habité jadis par les ouvriers papetiers, remplacés au cours du vingtième siècle par un sous prolétariat d'émigrés en tous genres. Un abcès purulent que la municipalité a vidé pour « réhabiliter » sainte Marie. Autrement dit pour en faire un piège à touristes affamés qui y trouvent des fast food, des restaurants exotiques et de « tradition ». Il y en a pour tous les goûts mais pas pour toutes les bourses.

 

Par la porte dite du Sauvage, par la rue du rempart de l'Ouest, on accède à la Ville basse. Qui recouvre la colline de pavillons banlieusards loués il y a quelques décennies avec possibilité d'accession à la propriété. Quand l’industrie papetière tournait encore à plein régime, on avait à cœur d'embourgeoiser le prolétaire en en faisant un possédant.

 

Séparée de la Ville basse par un cordon sanitaire invisible mais infranchissable, isolée du reste de l'humanité, La Garenne de Bosso traversée par la rue du rempart de l'Ouest.

Coincée dans une boucle du fleuve qui l'empêche de se disséminer comme une infection virale et de contaminer toute la ville et la campagne alentour.

 

La Garenne de Bosso.

Un véritable chancre syphilitique purulant à l'extrême.

Traversée jusqu'au fleuve par la rue du rempart de l'Ouest qui devient commerçante. Où subsistent un bureau de poste pour toucher ses aides sociales, quand on en a, deux boucheries hallal, un épicier arabe ouverts jusque tard dans la nuit, deux bistrots pour les dépenser. Une banque aussi, mais on se demande bien pour qui et pour quoi. Et une pharmacie. Mais pas de médecin.

Juste un centre de consultions psychiatriques. C'est vrai que de vivre ici à de quoi rendre fou à lier. Et un pourrissoir/mouroir appelé EPHAD. Qui pue la pisse et la mort jusque sur le trottoir. Rempli surtout d'anciens pensionnaires de l'hôpital psychiatrique, qui n'y avaient plus leur place et dont on ne savait pas quoi faire.

Pudiquement appelée « quartier défavorisé ».

Des logements sociaux insalubres, qui menacent ruine.

Ce n'est pas un quartier.

C'est une zone, oubliée des flics et des services dits sociaux. Peuplée de racailles, de drogués en bout de course, de dealers et autres trafiquants en tous genres, d’immigrés plus ou moins clandestins.

De paumés de toutes sortes, brisés par la vie.

Ici, c'est Zola, peut être en pire, au XXI° siècle.

Ici, il n'y a pas de vertu ni de bien pensance.

On n'a pas les moyens pour ça.

Trop de misère noire et de malheur à l'infini.

A en crever.

On en crève derrière les murs qui cachent leur lèpre sous des tags aussi vengeurs qu'obscènes.

Quand on jamais eu, quand on n'a pas, quand on aura jamais les moyens de lire les grands auteurs, on hurle sa rage et son désespoir en dégueulant de l'obscénité.

Pas le choix.

 

La Garenne de Bosso et la Ville, haute et basse.

Deux mondes éloignés l'un de l'autre par des années lumières.

Qui se connaissent mais ne se reconnaissent pas.

Réunis pourtant par une haine mortelle et un farouche mépris de l'autre.

Dont on ne parle qu'en se bouchant le nez tant son odeur est insupportable.

L'autre qu'on ne veut pas regarder et encore moins rencontrer.

Sauf pour des rencontres furtives, dans l'ombre puante de la porte du Sauvage, haut lieu du commerce de shit et autres produits psychotropes.

Un commerce qui ne connait pas de crise.

 

Dans d'anciens entrepôts au début de la rue du rempart de l'Ouest, les conservatoires de danse et de musique et l'école, orgueilleusement nationale, des beaux arts. Installés là pour « déstigmatiser » la quartier et sa population en difficultés et développer la mixité sociale.

population qui se fout complètement du « culturel ».

 

Où l'on recouvre d'un vernis culturel la jeunesse des beaux quartiers. Où on la frotte au bas peuple. Il faut bien qu'elle voit le zoo de « ces gens là » et apprenne que la vie c'est ça aussi.

D'une pierre deux coups

 

 

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