TU ES LAIDE MAMAN

Aujourd'hui, jour d'été.

Un jour à marcher dans les rues, à errer, sans raison, sans destination, sans objectif déterminés une fois pour toutes.

Voilà le genre de choses qui la rend furieuse.

Tu dois savoir où tu vas, tu dois avoir un but précis Clara. Sans but précis on avance pas dans la vie ma fille.

Jusqu'à la place au vieux marché aux chevaux.

Main dans la main avec un mec, jeune bien sûr. La reine mère aime la chair fraiche et elle les finances pour sen consommer sans modération. Le dernier étalon en date je suppose. Souvent ma mère varie. Elle se fatigue vite de ses sex toys sur deux pattes.

J'espère très fort qu'elle ne me verra pas ou fera semblant de ne pas me voir. Prière inefficace à un ciel bleu mais vide. Ça ne fonctionne pas. Et elle s'assoit à ma table, sans y être invitée. Pourquoi du reste ? Elle est partout maîtresse du temps, de l'espace et des gens.

Tu n'a pas encore commander ? Un coca ?

Elle ne boit jamais d'alcool ma petite fille.

Pourquoi elle se sent obligée de lui dire ça ? Elle sait très bien que je bois de l'alcool, et pas qu'un peu certains soirs, et que je fume de l'herbe. Que je ne suis plus, et depuis longtemps, une petite fille non pubère.

Ça va mon bébé?

Son bébé !

Ça précise les choses.

Elle est la femme et je suis la petite fille.

Ça efface toute possibilité de rivalité féminine dans le grand jeu de la séduction. Toutes femmes sont ses rivales, même sa fille. Cette déjantée de la petite culotte s’imagine que je pourrais lui piquer ses mecs. Elle peut être rassurée ! Invariablement elle les choisit très cons. Genre minet gros frimeur qui paie l'essence de sa décapotable avec les sous des rombières. Alors ce n'est pas avec moi qu'ils se rafraichiront d'un petit coup de jeunette derrière les fagots !

Et elle parle, elle parle, très fort, en tenant la main de son jeunot bien en vue. Il faut que tous l'entendent et la regardent, inclinés bas devant la sapience universelle de celle qui sait tout sans avoir rien appris. Ils doivent tous pouvoir admirer sans réserve, quel impérial privilège, la capacité de séduction de cette femme exceptionnelle que dévore d'amour et de dévotion son Don Juan de fête foraine. En attente d'une surchauffe de carte bancaire.

Tu est ridicule ma pauvre mère.

Ridiculement ridicule.

Tu me ferais pitié si je pouvais éprouver pour toi un autre sentiment que la haine.

Tu es vieille, je suis jeune et je t'emmerde et tu le sais.

Tu es irrémédiablement vieille et ce ne sont pas tes amants qui te transfuseront un peu de jeunesse par leur voie spermatique.

Tu es vieille, tu es lourde, tu es usée maman.

Tous tes maquillages biologiques et de commerce équitable dont tu te tartines la figure et les fesses n'y changeront rien. Et tu devrais faire gaffe au soleil et aux cabines UV de ton esthéticienne. Ce n'est pas bon pour ta précieuse peau.

Pourquoi tu souris Clara, j'ai dit quelque chose de marrant ?

Non, tu ne dis jamais rien de marrant.

Je pense à ta ménopause. Elle ne va pas te rater. Alors gaffe aux bouffées de chaleur et à la sécheresse vaginale, à la disparition de ta libido. Et aux poils qui vont te pousser partout, toi qui te rase jusqu'au fond de la chatte !

Ta ménopause,

ce sera ma vengeance.