LES ADJECTIFS
Tu ne me parles jamais de moi.
J'aimerais que tu me parles de moi.
Que tu me dises que je suis belle.
Belle !
C'est quoi ça, belle ?
Un adjectif.
Je déteste les adjectifs.
Enfin, réfléchis un peu si tu n'es pas totalement aveuglée par
Je te le dis. Tu es belle. Et alors ? Ça va te faire plaisir, tu seras contente.
Mais ça n'aura aucun sens. Ce n'est qu'un adjectif. Donc rien de vraiment signifiant. Même si je te le décline dans toutes les langues, vivantes ou mortes, du monde, ça ne signifiera pas que tu es belle, tu peux être moche à faire peur, ou je peux te mentir pour que tu me fiches la paix et que tu m'ouvres tes cuisses.
Belle, un adjectif, une couche de maquillage bon marché et trop brillant. Pour masquer une certaine forme d'impuissance et de stérilité psychiques. Utilisé par qui manque de véritable appétence charnelle et tente de dissimuler, sous un grimage, hystériquement excessif, la cachexie de son imagination.
Te dire tu es belle, et je me sentirais immanquablement habillé de l'air stupide de l'idiot congénital qui, dans son imbécillité, s'obstine à chercher dans un ciel vide à voir quelque chose qu'il ignore et qui n'existe pas.
Non, ne l'espère pas.
Même pour te faire plaisir, je ne te le dirai pas. Ne compte pas sur moi pour la mièvrerie amoureuse. De toutes façon je ne peux pas te trouver belle. Tu n'es pas belle. Et je m'en fous. La beauté n'est pas de mon monde. Inaccessible sauf dans mes rêves. Tu as deux seins pour m'y branler, un cul pour m'accrocher, une bouche pour me sucer et une chatte où je peux, presque confortablement, décharger plus d'angoisse que de foutre.
Alors, tais-toi.
Approche.
Je te veux.
Dépouillée de littérature.
Nue d'adjectif.