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5 août 2017

BAUDELAIRE ENFIN !

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Baudelaire, enfin, il était temps dans ce siècle détestable.

 Après le sublime lyrisme racinien le XVIII° siècle n'offre aucune poésie digne de ce nom. C'est le siècle de la raison et non de l'émotion, du réalisme et non de l'imagination. On prépare la révolution, le temps n'est pas aux rêveries, excepté celles de ce pisse vinaigre de Rousseau. Après Racine et pendant un siècle, rien. André Chénier pendant la révolution ne vaut pas un clou. S'il n'avait pas été l'un des acteurs de la sanglante Terreur et passé à la guillotine qui se rappellerait aujourd'hui de ce petit poète à deux sous ?

Il faut attendre le XIX° siècle pour que la poésie revienne au goût du jour. Les terribles secousses du siècles précédent apaisées, on pouvait poétiser.

 Las !

 Voilà les romantiques.

 Citons en quelques uns.

 Lamartine, cet éternel pleurnichard indécis, Musset, traversé parfois par quelque éclair de génie, mais tout cela est bien fugace, Vigny qui à mon avis aurait dû se contenter d'une carrière militaire qui eût été peut être brillante s'il n'avait pas perdu son temps à versifier sur sa neurasthénie. Et enfin Hugo, le grand Victor Hugo. Le Wagner de la poésie. C'est pompier, c'est ronflant, mais c'est vide. Je ne comprendrai jamais comment et pourquoi cette grande gueule aux petits bras littéraires a acquis une telle place dans les lettres françaises. Il ne vaut pas plus cher que cet antique billet de cinq francs à son image.

Le romantisme pleure sur ses amours malheureuses, sur son destin de petit bourgeois névrosé. Ces jeunes gens qui mouraient d'amour mouraient surtout de tuberculose et de vérole. La dame aux Camélias ! Quel ennui ! Qu'elle se dépêche de passer l'arme à gauche et qu'elle cesse de nous casser les pieds ! Il n'y a pas de génie dans le romantisme.

 Et justement. Trois véritables génies sont injustement classés romantiques, Nerval, Gautier et Baudelaire. Ces trois là sont en dehors de toute école, au dessus de tous les autres. Incomparables.

Baudelaire ! Comment peut-on le taxer de romantique ? C'est tout le contraire d'un romantique. Il ne rêve pas Baudelaire, il regarde, il se regarde, il regarde les autres, il regarde le monde. Il regarde la vie, il regarde la mort. Avec un regard d'artiste au scalpel précis de chirurgien. Comme nul autre ne l'avait fait avant lui et comme personne ne le fera après il dissèque et son corps et son âme, le corps et l'âme humaine.

Sous un aspect extrêmement policé, ses sonnets sont des chefs d'oeuvres d'architecture poétique bien plus proche des classiques que des romantiques, ce révolté fout le feu partout où il passe, viole toutes les lois, ouvre les portes et les fenêtres des bordels et des prisons, abat les murs des asiles de fous ou de vieillards, ouvre des chemins inconnus vers des terres inexplorées. C'est à grands coups d'explosifs qu'il prépare le terrain aux suivants.

La révolution littéraire du XIX° siècle, contrairement à la légende, n' a pas eu lieu dans une salle de théâtre, la bataille d'Hernani ne fut qu'une bagarre entre vieilles barbes et jeunes barbes qui fatalement blanchiraient elles aussi. La révolution littéraire c'est dans les Fleurs du mal, Mon cœur mis à nu, Le Spleen de Paris et dans les critiques des peintres qu'elle a lieu. C'est le jeune Baudelaire qui en brandit l'étendard en hurlant qu'il faut fusiller le général Aupick. Bien sûr que le dit général ne sera pas fusillé pendant la révolution de 48 même s'il l'aurait mérité. Baudelaire n'en a rien a cirer de la révolution. Il porte un fusil à bout de bras comme il écrit, non pas en révolutionnaire, mais en révolté désireux de porter le feu partout, fasciné par la destruction d'un monde qui lui donne envie de vomir et pour voir peut être ce qu'il espère voir en sachant d'avance qu'il ne le verra jamais. Il fera sa révolution par sa plume. Et sa révolution porte loin très loin, bien plus loin que des coups de fusils.

Les révolutionnaires se sont réclamés du Capital et de Marx. Et le livre et l'auteur sont recouverts par la poussière et le sang de l'histoire. Avec Baudelaire est né quelque chose de vraiment subversif. La révolte de l'homme contre l'homme. Les Fleurs du mal sont éternelles. Elle ne seront pas recouvertes de poussière et de sang. A l'exception du sang des suicidés.

 

 

 

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