LUMIÈRE DOUBLE

Cette fille était superbe.

Devant elle, je me sentais face à un miroir qui mettait à nu toute ma médiocrité.

Elle magnétisait tous les regards mâles mais dans les yeux des femmes aussi, brillait une admiration d'où était, pour une fois, exclue toute jalousie.

Solaire.

Solaire était le premier mot qui venait à l'esprit de tous dans la semi pénombre d'un bar branché.

Un certain androgynat flottait dans sa féminité lumineuse. Une trace à peine visible de virilité douce. Elle en était au delà de la simple et pure beauté. Elle était l'attirance. La fascination, le trouble, l'étrange, une lumière de soleil et de noir profond. Une poésie du bizarre, un mystère esthétique surgi dont on ne sait où dans la grisaille universelle du quotidien. Surgi d'un lieu et d'un temps où nous n'avons pas de repère.

Un être chez qui, quand on croisait son regard, on sentait une farouche volonté de sculpture de soi, de sublimation de son corps, pour atteindre le beau. Sans la perfection du beau. Pour parvenir à une vie transfigurée parce qu'elle a franchi toutes les frontières.

Une ode vivante à la chair somptueuse, métamorphosée, transfigurée, parce que consentant sans souci d'économie, à la vitalité débordante, à l'abondance, à la magnificence.

Elle semblait à l'abri du temps et de la nature qui ne pardonnent rien. Indestructible dans l'harmonie de l'ici et maintenant.

Sortie des limbes de la féminité pour se soumettre à la volonté de jouissance de soi, dans une arithmétique parfaite du plaisir.

Une féminité teinté de virilité, une virilité colorée de féminité.

Une créature oxymorique à double volupté.